Chaque projet a son histoire. Comme bien souvent dans le rock, et même dans la musique en général, cette histoire est faite de rencontres, de hasards, de déceptions et de coups durs bien sûr, mais aussi de partage et de moments de joies, cimentés par cette cause commune, ce plaisir d’être unis et de donner vie ensemble à un même projet.
A la manière d’un architecte qui recule de quelques pas pour porter un regard sur l’édifice qu’il a conçu, nous allons tâcher, au mieux, de vous raconter l’histoire de KEWENE, qui fait du groupe ce qu’il est aujourd’hui.
KEWENE a connu en fait deux grandes phases. D’autres diraient « deux vies ». Si on reprend la métaphore architecturale, alors la première phase correspondrait aux fondations du bâtiment, la seconde à la construction des murs et du gros œuvre, qui donne au bâtiment l’aspect qu’il a aujourd’hui.
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LES FONDATIONS
Le groupe est né en 2003, par la volonté de ses trois membres fondateurs composé de Soif (l’initiateur du projet et guitariste/chanteur), Jérôme à la batterie et Tristan à la basse, désireux de faire de la musique ensembles, avec cette structure « power-trio » rendue si populaire dès les années 60, et présente dans nombre de leurs influences, tels Placebo, Nirvana, ou encore Muse.
Comme pour tout groupe, le choix du nom est cornélien. Swen est d’abord proposé, mais depuis 2002 le rockeur français Damien Saez surfe sur la vague de son « God blesse » et est déjà haut sur les marches du rock français. A cause de la ressemblance Swen/Saez, l’idée est abandonnée. Le groupe, qui joue sa première date dans la ville morbihannaise de Quéven (dont le nom breton est Kewenn) et dont le chanteur connait la naissance d’un petit « Ewen » dans sa famille, y voit un drôle de signe, et décide de se baptiser KEWENE (prononcer kéwène).
S’enchainent alors les phases de composition, où les nombreux textes de Soif, le chanteur et guitariste du groupe, vont trouver leur assise musicale et former des morceaux bruts et incisifs, entrecoupant mélodies claires et riffs saturés énergiques. Ces morceaux vont ensuite être éprouvés sur les scènes, essentiellement bretonnes avant de venir se déverser sur le premier disque autoproduit du groupe. Nous sommes en 2007, soit quatre ans déjà après la constitution du groupe, et sort le single « L’éternel &moi ».
S’ensuivent deux années encore de nouvelles compositions et de live, avant que le groupe sorte son second disque autoproduit, intitulé « Mon univers », un cinq titres qui se termine par la chanson au titre éponyme.
BLACKOUT
Pour (re-)construire, il faut parfois détruire. C’est empreint dans l’histoire de KEWENE, et à ce moment-là plus que jamais. L’année 2012 s’entame par un « split » inopportun du groupe, dont la section rythmique (basse – batterie) est amenée, pour les raisons de la vie (professionnelle / couple) à quitter la région bretonne. L’enseigne néon « kéwène », à la fine écriture ronde, presque enfantine, clignote quelque peu et finit par s’éteindre, fatiguée.
(RE)-NAISSANCE
Eté 2012. Mené par l’envie de reprendre la scène avec son groupe chéri, Soif décide de relancer la machine. D’abord seul, avec sa guitare acoustique et les textes qu’il ne cesse jamais d’écrire, puis avec de nouveaux musiciens qu’il va chercher à « recruter ». Nous sommes en été 2012, et les sites internet de recherche de musiciens pullulent sur la toile : Soif décide de tenter sa chance, et publie une annonce pour reformer KEWENE.
Des auditions s’enchainent rapidement, et la section rythmique se reforme avec Toto, un batteur aux origines bordelaises ivre de musique stoner, et Hyde, un bassiste aux influences post-punk.
C’est là que servent les fondations : le groupe souhaitant rapidement se souder par la scène, la pléthore d’anciens morceaux du groupe va ressurgir et permettre au « nouveau » KEWENE de se constituer une setlist convaincante en seulement quelques sessions de répétition, setlist qui sera renforcée par « Odéon ou panthéon », le titre emblématique du groupe, composé à l’époque et encore joué aujourd’hui !
Dès la fin 2012, le nouveau trio repart à l’assaut de la scène bretonne, on notera tout particulièrement le « concert pour la fin du monde », en référence aux prédictions des Mayas, cette date ayant eu lieu à Rennes le 21 décembre 2012.
A l’aube de 2013, soucieux de présenter un support lors de ses démarchages qui soit fidèle à la nouvelle composition du groupe, KEWENE va enregistrer rapidement un single entièrement autoproduit, « Mon ombre », dont même la pochette est collée à la main par les membres du groupe ! C’est à cette occasion que le logo du groupe va clairement s’affirmer, afin de représenter sa musique telle qu’elle est voulue : brute, minimaliste, aux sonorités plus que jamais rock clairement affirmées.
QUATUOR ?
2013 va également amorcer un changement très significatif pour KEWENE, alors en pleine phase d’expérimentations et recherchant son « nouveau son » : la décision de recruter un guitariste « soliste ». On ne change pas une équipe qui gagne, le système d’annonces en ligne étant encore très efficace, Robin sera recruté en tant que guitariste soliste, apportant à la setlist un vent frais et lyrique, alternant envoutantes nappes profondes et solos saturés ravageurs. La gestion d’un quatrième emploi du temps apporte toutefois son lot d’inconvénient : les répétitions axées sur la composition ralentissent quelque peu, et le groupe peine à sortir son nouveau single « Sans Entraves », qui va être enregistré dans un studio clairement peu adapté au son rock. Un projet de clip émerge, des idées sont échangées mais très vite avortées par l’arrivé d’un nouveau coup dur pour le groupe : les départs de Toto et Robin, séparation et vie étudiante faisant un bien mauvais ménage.
EN TOTALE IMMERSION
Amputé mais décidemment en vie, KEWENE, alors formé de son frontman Soif et de son bassiste Hyde, relancent de plus belles les recherches, et retrouvent très rapidement leur nouveau batteur en la personne de Mèd, jeune guitariste virtuose et multi-instrumentiste. Son incroyable rapidité d’adaptation et la simplicité de son jeu séduit immédiatement Soif et Hyde, qui décident de le recruter dès la première audition afin de repartir de plus belle à l’aventure.
Un vent nouveau souffle sur KEWENE, dont le style s’affirme très clairement par la reformation en power-trio : du minimaliste, du brut, et de la poésie. Le son du groupe se sature, s’alourdit, et les nouveaux morceaux se succèdent au rythme où s’enchainent les dates de concert. Dynamique, le groupe décide de tenter un « tremplin », qu’il remporte aussitôt, s’octroyant la possibilité de jouer au sein d’un festival local. Euphorique, KEWENE décide d’enregistrer un EP. Le mot d’ordre est donné : l’objet devra être graphique, visuellement agréable tout en restant à l’image du groupe : minimaliste, et la musique devra être « brute de décoffrage », fidèle aux prestations live du groupe.
Après de nombreux échanges d’idées, le nom se révèle de lui-même comme évidence : IMMERSION, en référence à cette période de « bulle créative » dans laquelle les morceaux qui composent l’EP ont été écrits. On notera notamment « Effet miroir », qui fait partie des incontournables du groupe encore aujourd’hui, et le retour à une version plus minimaliste de « Sans Entraves ».
Autre point important, c’est à partir de ce moment-là que le groupe adopte son visuel désormais devenu icône de KEWENE : l’horloge, dessinée par l’artiste Florine KERAUDREN, apparaissant comme éclatée et morcelée sur la pochette noire et blanche de l’EP. Celui-ci est enregistré et mixé aux studios Boozooq, dont le groupe se rappelle suite à l’aide précieuse apportée par Ronan au mastering de la première version de « Sans Entraves ».
Outre la sortie de son fidèle EP encore défendu en live aujourd’hui, un autre évènement nettement moins joyeux va marquer cette fin d’année 2015 : le départ de Mèd, dont l’ambition a toujours été de devenir guitariste professionnel, qui voit son rêve se réaliser et rendant impossible son maintien au sein du groupe.
AFFIRMATION
Refusant d’abandonner après un tel chemin parcouru et convaincus de tenir quelque chose, Soif et Hyde relancent des recherches pour un poste de batteur, dont la place est encore chaude. Là encore, une première audition « coup de cœur », avec Xav’, dont le jeu à la fois puissant et technique séduit immédiatement, sans compter son goût affirmé pour le rock français. Nous sommes en fin 2015, et le groupe repart de plus belle à l’assaut de la scène, pour défendre son EP IMMERSION qui n’a pas vraiment eu le temps d’avoir son mot à dire.
S’ensuit une année 2016 riche et musicale, axée sur la composition d’une nouvelle setlist permettant à Xav’ de poser sa pierre à l’édifice, et le souhait affirmé d’aller vers un objectif plus ambitieux : un album. On notera la présence de KEWENE sur l’affiche de l’édition 2016 du Festival du Roi Arthur, et la victoire au tremplin pour le festival pédale wah-wah, où le groupe partagera la scène avec Merzhin, et sera amené à les recroiser…
2017 est une année charnière pour le groupe. Elle voit en effet se concrétiser l’objectif tant attendu : l’enregistrement du premier album. On garde un bon souvenir du studio Boozooq, et Kewene décide d’y retourner : l’enregistrement se fera sur deux jours et demi en tout début du mois de mai 2017, et sera en fin de compte difficile pour le groupe, dont quelques dissensions se révèleront : un départ de Hyde sera évité de très peu. Malgré tout l’album « CORROSION REVERSIBLE » sera enregistré, et son côté visuel aura le même mot d’ordre que pour IMMERSION : avant tout un bel objet, à l’aspect « graphique » très affirmé. KEWENE adoptera avec ce disque une image forte, mettant à l’honneur la rouille et l’entropie, tout en ouvrant des perspectives d’espoir. Dix toiles seront réalisées pour les besoin de cet album par Florine, et orneront le livret accompagnant le CD. Musicalement, KEWENE affirme son style sur cet album, avec un son tantôt rugueux tantôt psychédélique, conservant sa marque de fabrique : des textes entièrement en français posés sur des mélodies simples et efficaces. On notera ici comme morceau « bonus » à cet album un retour du titre « Odéon ou panthéon », qui fera l’objet d’un enregistrement « prise live » en one-shot, ce qui n’est pas le cas du reste de l’album.
CORROSION REVERSIBLE sortira finalement en toute fin d’année 2017, et sera défendu par le groupe au fil de ses concerts durant une bonne année. A cette occasion KEWENE participera à différents festivals, dont Trédasound (22) aux côtés de Merzhin. C’est finalement à l’été 2018 que le groupe connaîtra le départ de Xav’ de son poste de batteur pour raisons familiales et pour suivre d’autres projets.
DES CENDRES A LA LUMIERE
La « période de flottement » sera ensuite plus longue que les fois précédentes, et le groupe va se trouver amputé de son batteur durant quatre bons mois, avant de faire la connaissance de Max, batteur aux influences jazz très marquées, qui va apporter un style très différent de ce que KEWENE a connu jusqu’alors sur ses morceaux. La setlist s’étant radicalement étoffée, et les nouvelles compositions de CORROSION REVERSIBLE s’étant quelque peu complexifiées en comparaison avec les morceaux d’origine du groupe, davantage de répétitions vont être nécessaire, pour un KEWENE reformé qui souhaite afficher sur scène une réelle cohésion entre ses différents membres.
Il faudra attendre le début de l’année 2019 pour voir se produire une nouvelle fois le groupe sur les scènes bretonnes, et réattaquer (et gagner) de nouveaux tremplins. Dès le 1er mai 2019, le groupe est retourné en session d’enregistrement au studio Boozooq afin d’enregistrer son nouveau single, « De la cendre sur les paupières », dont la diffusion est prévue au public en fin du mois d’octobre 2019, par la sortie d’un clip, qui, comme le reste de l’image graphique du groupe, proposera un véritable petit film aux visuels marquants et de qualité.
KEWENE
P.s: Un grand merci à Hyde pour cette rétrospective…